La réalité du tasawwouf islamique

La louange est à Allah Celui Qui a fait couler les larmes de ceux qui ont peur du jour du jugement ; leurs larmes ont coulé comme les sources et c'est Lui Qui a éloigné les nuages de larmes, c'est Lui Qui a fait arroser par des nuages de larmes les yeux de gens dont les côtés ne retrouvent pas les couches tant ils pleurent. Ils ont fait ainsi de la piété le meilleur de leur habit. La peur et la crainte ont fait voler leur somnolence, eux qui, tandis que les gens sont heureux, sont tristes. Alors que les larmes ont empêché leur sommeil, ils pleurent ainsi avec un cœur attristé, ils ne se lassent pas de pleurer. Il est exempt de toute imperfection Celui Qui fait rire et Qui fait pleurer, Celui Qui fait mourir et Qui fait revivre.

Allah ta^ala dit ce qui signifie : « Certes ceux qui ont dit : notre Seigneur est Allah et qui ont suivi le droit chemin, les anges descendent sur eux, et leur disent de ne pas avoir de crainte ni de chagrin en leur annonçant la bonne nouvelle du Paradis qui vous a été promis. Nous sommes chargés de vous dans la vie d'ici-bas et dans l'au-delà et vous y aurez ce que vos âmes désirent et vous y aurez ce que vous attendez par la grâce de Celui Qui pardonne, du Très Miséricordieux ».

Allah ta^ala dit ce qui signifie : « Certes les saints de Allah n'ont pas à avoir de crainte ni à être chagrinés, eux qui ont cru et qui ont fait preuve de piété, à eux l'annonce de bonnes nouvelles pour la vie de ce bas-monde et dans l'au-delà ».

Il dit aussi ta^ala ce qui signifie : « Ceux-là seront avec ceux à qui Allah accorde la grâce, les prophètes, les véridiques, les martyrs, les vertueux et quels bons compagnons que ceux-là ! »

Et Il dit ta^ala ce qui signifie : « Ô vous qui avez cru, craignez Allah et dites des paroles justes. Il vous corrige vos actes et vous pardonne vos péchés et celui qui obéit à Allah et à Son messager aura gagné la grande réussite ».

Allah ta^ala a ordonné al-qawlou s-sadid, c'est une expression de la parole qui est approuvée dans la loi, ce n'est pas ce que les gens qui n'ont aucune connaissance de la religion considèrent comme de bonnes paroles parce qu'il se peut que les gens qui ne sont pas pris en considération en raison de leur ignorance de la religion, considèrent des paroles mauvaises comme bonnes de même qu'il se peut qu'ils considèrent les bonnes paroles selon la loi de Allah comme mauvaises. Ce qui est à prendre en considération, ce sont les gens qui ont une compréhension de la religion c'est-à-dire qui connaissent le livre de Allah et qui œuvrent selon Ses lois. Voilà ceux dont on prend en considération la bonne compréhension. On les prend comme modèles parce que la règle conforme à la religion au sujet de laquelle deux musulmans ne se contredisent pas, c'est que la chose approuvée dans la Loi, voilà ce qui est bon et ce que la Loi désapprouve, voilà ce qui est mauvais. La masse qui ne connaît pas la Loi et qui ne sait faire qu'une chose, suivre les gens sans preuve et sans connaissance des jugements de la loi de Allah, ceux-là prennent en considération l'apparence et suivent toute personne qui se met à brailler. Ceux-là ne se rendent compte de rien selon le jugement de Allah.

Parmi les épreuves qui nous sont arrivées dans cette époque, c'est qu'il y a des gens qui propagent des mensonges et des paroles corrompues au nom du soufisme alors qu'en réalité, ils n'ont connu du soufisme que le nom. Dès lors, pour éviter de tomber dans leur piège, il convient de connaître la voie soufie à partir des maîtres, des gens de la Tariqah c'est-à-dire d'éveiller une prise de conscience chez les gens et de leur conseiller de s'éloigner de ceux qui embellissent ce que la Loi a enlaidi et qui enlaidissent ce que la Loi a embelli. Le premier des soufis est Abou Bakr As-Siddiq, que Allah l'agrée. Puis viennent tous ceux qui lui furent semblables dans sa conduite qui consiste en réalité à suivre le Messager . Celui qui a agi avec un comportement pur à l'égard de son Seigneur, qui a été sincère envers son Seigneur dans son for intérieur, qui a eu une bonne intention et qui a corrigé son intention, c'est celui-là le soufi par l'évocation du nom duquel les miséricordes descendent.

Des exemples de certains grands soufis

Le plus grand des soufis parmi ceux qui sont venus après les compagnons fut Al-Qarniyy : il était connu pour ses vêtements usagés et par l'aspect usé de son apparence, les enfants pensaient qu'il était fou. Seulement celui qui connaît la religion de Allah le connaît véritablement. Le Messager de Allah  a dit ce qui signifie : « Il a une mère à l'égard de laquelle il est bienfaisant, il a été atteint par la lèpre. Allah ta^ala l'en a guéri sauf la surface d'un dirham. Si jamais vous le rencontrez, demandez-lui qu'il demande à Allah de vous pardonner » Ensuite après le décès du Messager  alors que ^Oumar avait entendu le hadith du Prophète, il avait demandé du renfort du Yémen. Lorsque les combattants arrivèrent auprès de lui du Yémen pour l'aider dans le jihad, il leur demandait s'il y avait parmi eux 'Ouways Ibnou ^Amr, jusqu'au moment où il rencontra certains d'entre eux qui le connaissaient et qui lui dirent : « Il est bien avec nous ». ^Oumar, que Allah l'agrée, le rencontra. Il lui demanda :

 - Es-tu bien le fils de ^Amr de la tribu et de Mourad ? 

- Oui

- Tu avais la lèpre et Allah t'en a guéri si ce n'est la surface d'un dirham ?

- Oui

- Tu as une mère et tu es bienfaisant envers elle ?

- Oui

- Alors, demande à Allah qu'il me pardonne.

C'est alors que par modestie, il lui a répondu : « Vous êtes plus récent que moi dans le bon voyage ». C'est-à-dire : Toi, Emir des croyants, tu viens d'arriver du voyage de La Mecque.

^Oumar insistant auprès de lui, il leur fit des invocations pour que Allah leur pardonne. Il s'agit de 'Ouways Ibnou ^Amr. Le Messager  a dit à son sujet qu'il est le meilleur de ceux qui viendraient après les compagnons et qu'il est le meilleur des saints après les saints parmi les compagnons. ^Oumar lui a dit : « Je donne un écrit à mon représentant afin qu'il te donnera de l'argent régulièrement ». Il avait répondu : « Je préfère être dans la pauvreté dans le désert, c'est mieux pour moi ». Il n'a pas accepté qu'on lui donne un salaire, il avait préféré sa pauvreté à la richesse et au confort. Regardez le maître des soufis parmi les tabi^iyy, et regardez la calomnie de certains individus de cette époque qui rabaissent la pauvreté, qui font de la pauvreté et du manque d'argent un défaut. Ils ne savent pas que celui qui est honorable selon le jugement de notre Seigneur, c'est l'esclave qui est pieux, qu'il soit riche ou pauvre. De plus de nombreux pieux sont pauvres. Après cela comment quelqu'un prétendra-t-il être musulman soufi ou être un chaykh en religion en blâmant par la suite la pauvreté sans détail et en disant que la pauvreté et l'Islam ne sont pas compatibles ? Le soufisme c'est de contrarier ses passions. Allah ta^ala dit ce qui signifie : « Quant à celui qui aura craint son Seigneur et qui aura interdit à son âme la passion, le Paradis sera son refuge ».

La passion, c'est toute chose vers laquelle penche l'âme et qui lui convient, même si c'est au nom de la religion. C'est-à-dire que la personne qui suit les passions de son âme sans raison légale religieuse est blâmable parce qu'elle a suivi sa nature et s'est mise en accord avec ses désirs interdits et avec le désir de s'élever sur terre. C'est-à-dire que si la personne suit ses passions (et les passions ici c'est d'être en accord avec les désirs de son âme sans raison religieuse) ses passions sont en accord avec les désirs de son âme. C'est comme par exemple celui qui se prétend soufi et qui consomme du bien de l'aumône légale (az-zakat). Il fait que sa barbe soit longue, il met des habits usés pour que les gens pensent qu'il est pauvre et lui donnent des aumônes en consommant ce bien. Il aura commis ainsi un péché parce qu'il aura trompé les gens avec son apparence et consommé un bien qui ne lui revient pas de droit. Ils ont pensé que c'est une preuve de l'agrément de Allah alors que c'en est loin. A titre d'exemple, il y a celui dont les sens sont occupés par les mélodies et l'agencement de ses mouvements, comme ceux qui organisent des cercles d'évocations et qui se préoccupent de la mélodie, de la coordination de leurs mouvements pour avoir tous la même apparence. Ils déforment le nom de Allah et prononcent 'ah ou bien 'ah ou bien 'ah 'ah ou bien 'ih. Ils brûlent de l'encens et mettent des habits semblables les uns aux autres, des toques qui se ressemblent pour que leur aspect soit cohérent. Ils prolongent les lettres qui ne nécessitent pas de prolongation et raccourcissent celles qui sont prolongées. Et ainsi de suite. Ces gens-là se sont occupés de l'apparence tout en oubliant l'application des invocations véritables. Cela les a entraînés à déformer le nom de Allah. De nombreuses personnes parmi les adeptes des tariqah et plus précisément parmi les adeptes des chadhouliyyah se sont habitués à déformer le nom de Allah. Au lieu de dire Allah, ils disent « 'ah, 'ah, 'ah » alors que 'ah dans la langue arabe est un terme qui exprime la plainte et la douleur, tout ceci parce que 'ah est facile à prononcer. C'est-à-dire qu'ils ont ainsi composé des mélodies et des rythmes qui sont en accord avec le mouvement rapide de leurs sursauts et de leurs danses. L'égarement a atteint certains d'entre eux jusqu'à dire que faire les invocations avec 'ah entraînerait plus d'ouvertures qu'avec le nom de Allah. Selon eux, celui qui dit 'ah parvient à la sainteté et il lui est dévoilé des choses, il ferait alors partie des gens de degré élevé plus rapidement que celui qui dit Allah. C'est de la mécréance, que Allah ta^ala nous en préserve. Ils se sont mis à pratiquer cela – les évocations par 'ah – par égard aux mouvements auxquels ils se sont habitués, ils se sont mis ainsi à détester celui qui fait les invocations avec le nom de Allah. Leur passion les a poussés à la discorde, le chaytan les a entraînés à la confusion et les a égarés. Il leur est apparu que ce qu'ils font, c'est cela l'amour envers Allah, alors qu'en réalité c'est une désobéissance envers Allah. Si une personne dit, alors qu'elle est en train d'effectuer sa prière « 'Ahou 'akbar » ou bien « Sami^a 'ah liman hamidah », sa prière est annulée, ceci est en accord avec les quatre écoles. Si 'ah était un des noms de Allah, ils n'auraient pas déclaré que sa prière est annulée par ce mot. 'Ah en arabe est composé de trois lettres, parce que la lettre qui est prolongée est considérée comme étant deux lettres ; si une personne baille alors qu'elle est en train d'effectuer sa prière et qu'elle prononce le mot 'ah délibérément, sa prière est annulée. Changer le nom de Allah est interdit. Ils ont rajouté à cela qu'en ces occasions, ils dansent d'une danse qui comporte le fait de se plier et de faire un mouvement qui consiste à plier le corps. Ceci est interdit pour les hommes comme pour les femmes. Toutefois si la personne saute vers le haut cela est permis. Le tathanni, c'est le fait de se plier du haut vers le bas ou le contraire et le takassour c'est le fait de se pencher à droite et à gauche ; quant au fait de sauter vers le haut, c'est un saut léger du haut vers le bas. Ceci est une des catégories de désir et de passion qui sont laids mais beaucoup de personnes ignorent que c'est laid. Ceux-là pensent de même qu'ils font partie des saints et ils attendent l'apparition des prodiges sur leurs mains pendant les évocations. Pourtant celui qui dit 'ah au lieu de Allah, celui-là sera très éloigné de la sainteté tant qu'il ne se sera pas repenti et qu'il ne sera pas revenu de ses pensées antérieures. Après quoi, il se peut que Allah ta^ala le fasse parvenir à la sainteté, ou non. Celui qui est imbu de lui-même en se prétendant soufi alors qu'il est éloigné selon le jugement de Allah ta^ala, celui-là ne fait pas partie de ceux qui sont proches, des gens de la science, de la connaissance et du goût sain ; ceux-là savent que c'est chose laide.

Comment avons-nous su que l'invocation par 'ah n'est pas permise ? Nous l'avons appris, nous en avons pris connaissance. Celui qui en revanche n'a pas appris et qui a voulu par ignorance faire l'évocation de Allah, le diable lui dit : « dis 'ah, tu parviendras à la sainteté plus vite ». S'il a cru que c'est de l'évocation, le diable l'aura induit en erreur et l'aura fait tombé dans le péché sans même qu'il le sache. Il aura suivi ses passions et ses passions cachées l'auront fait tomber dans le péché. Al-Jounayd est le maître des soufis du début du quatrième siècle de l'hégire, il était également un spécialiste de la jurisprudence ; venaient à ses assemblées des personnalités littéraires spécialistes de la grammaire, de la rhétorique, de la jurisprudence, ils profitaient de ses connaissances dans la science qu'ils lui demandaient. Quant aux soufis, il était un de leur adepte. Il a dit, que Allah l'agrée : « Nous n'avons pas pris le tasawwouf par le fait de rapporter les paroles fortuitement, mais nous l'avons pris après les veilles et la faim, après le délaissement des choses auxquelles la personne s'était habituée et que l'âme désirait » C'est-à-dire en contredisant les passions. Parce que le tasawwouf part du comportement, tout comme le dit Harith qui est l'un des compagnons du Messager de Allah r et qui fait partie des Partisans (al-'ansar), il a dit : « Je me suis retrouvé détourné du bas-monde, j'ai veillé mes nuits et j'ai assoiffé mes jours, et c'est comme si j'avais le Trône de mon Seigneur devant moi, comme si je voyais les gens du Paradis se rendre visite les uns aux autres et comme si j'entendais les gens de l'enfer hurler à l'intérieur » C'est-à-dire : je n'ai pas laissé mon âme se prolonger dans les désirs. Les soufis n'interdisent pas ce que Allah a rendu licite. Seulement, si on prend l'exemple des prophètes de Allah, l'un d'eux ne s'adonnait pas aux plaisirs continuellement. Voici le Messager de Allah . Celui qui a connu sa biographie aura su qu'il avait souvent faim, qu'il préférait les autres à lui-même et qu'il avait faim la plupart du temps. On n'attisait pas de feu chez lui la majeure partie du mois et sa famille se suffisait d'eau et de dattes. Voici Abou Bakr que l'on a vu après qu'il fut devenu calife transporter certaines choses pour en tirer les dépenses pour sa famille. On lui a dit : « Ô calife du Messager de Allah nous te suffisons, pourquoi sors-tu travailler toi-même ? »

En résumé, le tasawwouf c'est la pureté du comportement à l'égard de Allah et la véracité dans la parole, l'acte et l'intention, c'est éviter l'interdit et s'attacher au devoir, multiplier les actes surérogatoires d'obéissance et attacher son cœur à l'au-delà, avoir de la pitié pour les pauvres et les miséreux, aider les veuves et les nécessiteux, ne pas avoir le cœur attaché au bas-monde et à son embellissement, avec la modestie, l'humilité, la vue voilée et la préservation des organes, avec l'indulgence, la politesse, l'embellissement par les règles de politesse de la Loi et en suivant le Messager en toute chose, petite ou grande. C'est également œuvrer selon la parole de Allah ta^ala qui signifie : « Dis : si vraiment vous aimez Allah, suivez-moi, il se peut que Allah vous accorde Son agrément ». Il devient clair que le soufi est celui qui a mis as-souf (la laine) sur as-safa (la pureté), qui a pris le chemin de Al-Moustafa (l'Elu), qui a donné à goûter à l'homme l'eau et la nourriture des pauvres et l'a fait goûter à son ego, qui a fait en sorte que le bas-monde soit derrière son dos. Ô Allah, fais que nous soyons ascètes dans ce bas monde, fais que nous désirions l'au-delà et pardonne-nous afin que nous puissions compléter le manque qui est en nous, fais-nous connaître nos défauts et accorde-nous la réussite pour les corriger. La louange est à Allah le Seigneur des mondes.